Eglises fortifiées
Entre les 16ème et 18ème siècles, temps où les guerres civiles et religieuses se succèdent sans discontinuité, certaines régions (dont celle de la Thiérache – Aisne et Ardennes françaises – où les photos sont prises) voient défiler la plupart des armées d’Europe ainsi que les bandes d’écorcheurs qui les suivent.
Les exactions, les pillages et les tueries mettent à mal les paysans qui fuient et trouvent refuge, précaire, dans les forêts. Ces campagnes sont isolées de grands axes stratégiques et économiques, et par conséquent de grands lieux de protections que peuvent être les villes, les châteaux et parfois les abbayes. Des villages entiers et leurs alentours sont désertés. Les champs sont à l’abandon et l’économie locale est sinistrée.
Les églises sont souvent les seuls édifices bâtis de pierres ou de briques (au moins partiellement), là où les maisons sont construites en ossatures bois recouvertes de torchis et toits en chaume.
Le clergé décide, au nom de « l’intérêt » de la collectivité, la fortification de certaines églises. Elles offrent non seulement des constructions dont les bases sont solides, mais aussi une architecture aux volumes assez vastes pour accueillir un grand nombre de personnes et du bétail. Les clochers sont des postes d’observation idéaux et les cloches peuvent sonner l’alarme. Il s’agit de résister quelques jours contre ces petites bandes armées, dépourvues d’artillerie de feu, qui pratiquent plutôt le pillage que les combats, mais n’en reste pas moins une calamité contre laquelle il faut se protéger.
Malgré les lourdes charges financières que ces transformations entraînent pour les villageois et paysans (peu pour le clergé !), les églises sont consolidées par des éléments de « défense passive » (fossés, murs – souvent ceux des cimetières qui jouxtent les églises,…) ou par des éléments de « défense active » (tours d’angles, donjons, échauguettes, meurtrières, mâchicoulis, …). Ces travaux sont réalisés sans règles systématiques, mais en profitant au mieux des qualités constructives des bâtiments existants, selon les matériaux, les dispositions topographiques, les volumétries … d’où la grande variété formelle des fortifications d’une église à l’autre.